Au départ, il s’agissait d’une activité à but non lucratif. Puis, avec le succès, les revenus ont commencé à affluer. Radio Ambulante, site hispanophone basé aux Etats-Unis, peut aujourd’hui salarier ses fondateurs. Au départ, l’idée était toute simple : proposer des podcasts en espagnol aux 50 millions d’hispanophones résidant aux Etats-Unis. La raison du succès ? Des formats longs et, surtout, une approche débarrassée des clichés souvent véhiculés par la presse américaine “mainstream” dès lors qu’elle traite de sujets “latinos.” Basée à New York, l’organisation -toujours à but non lucratif- compte désormais plus de 20 salariés dans plus de 12 villes d’Amérique latine, d’Europe et des États-Unis.
C’est en 2012 à Oakland, Californie, que Carolina Guerrero et Daniel Alarcón, les co-fondateurs de « Radio Ambulante », ont créé l’association. Le profil des fondateurs explique le rayonnement actuel du site de podcasts : producteur exécutif de « Radio Ambulante », Daniel Alarcón, est né à Lima, au Pérou, et a grandi aux États-Unis. Il enseigne le journalisme audio long format à l’école de journalisme de Columbia. Carolina Guerrero, bénéficiaire d’une bourse de journalisme à l’université de Stanford, est PDG de l’organisation. Née en Colombie, elle vit aux États-Unis depuis une vingtaine d’années.
« Nous ne savions rien de la radio ou de la production radio, alors nous devions tout apprendre », a indiqué Carolina Guerrero à la Fondation Nieman en février dernier. « Je n’ai pas reçu de salaire de Radio Ambulante pendant quatre ans », a expliqué son mari Daniel Alarcón. « Nous avons eu la chance d’avoir d’autres moyens de gagner de l’argent, mais nous cumulions des heures de travail non stop pour vivre ».
La première saison, seuls trois épisodes furent produit, et ont obtenu un total de 7 000 auditeurs.
La pétite d’or : Lula, une appli pour apprendre l’espagnol
Au tout début, Radio Ambulante fut principalement financée par des subventions. Mais, en 2016, changement de braquet: NPR, le service public de radiodiffusion américain, devient le distributeur exclusif du podcast et l’audience grimpe en flèche. Aujourd’hui, le compteur affiche plus de 150 épisodes, pour un total de 18 millions de téléchargements. Le financement compte toujours sur les dons des auditeurs, appelés à devenir « membres. » Quatre niveaux de dons sont proposés : le niveau 1 (de 1 à 35 dollars par an) offre une « image numérique personnalisée. » Le niveau 2 (de 36 à 99 dollars par an) offre des fonds d’écran et des cartes postales virtuelles. Le niveau 3 (de 100 à 499 dollars) offre l’accès à toutes les archives, à une newsletter exclusive, et donne droit à un coup de fil mensuel à un membre de la rédaction. Quant au niveau 4 (500 dollars et plus), il donne droit notamment à une consultation de 15 minutes avec un membre de la rédaction, et à un package personnalisé avec une sélection de produits de leur boutique virtuelle. Un savoir-faire marketing qui explique que Radio Ambulante ne connaît pas la crise, contrairement à beaucoup de sites d’info indépendants.
La “pépite” du site est sans doute “Lula”, une application extrêmement bien faite destinée à celles et ceux qui veulent apprendre l’espagnol (voir notre vidéo ici.) L’idée est simple : après avoir téléchargé l’application (version d’essai gratuite), vous cliquez sur un article. Celui-ci s’affiche alors à l’écran, et certains mots sont soulignés en vert. Il est alors possible de de cliquer sur ces mots pour en avoir la traduction immédiate. L’interface est très soignée : ainsi, on peut choisir de faire apparaître tout le texte en entier, ou, pour rendre l’exercice difficile, de faire en sorte que les mots ne s’affichent qu’au fur et à mesure de leur prononciation par le locuteur -dans les deux cas, en effet, il s’agit d’un podcast audio qui se double d’une transcription textuelle.
De manière plus classique, Radio Ambulante mise aussi sur « El Hilo » (« Le fil »), un podcast hebdomadaire en espagnol d’information et d’analyses. Avec l’expansion, Radio Ambulant a revu ses ambitions à la hausse : l’étape suivante est carrément ambitieuse, puisqu’elle prévoit la vente de droits cinématographiques et télévisuels.
L’interview de Carolina Guerrero et Daniel Alarcón est à lire sur le site de la fondation Nieman.